La productivité des travailleurs est-elle en cause ?

Dans notre monde en compétition généralisée, la productivité des travailleurs est mise à mal par les nombreuses charges qui pèsent sur le coût du travail. De longue date et au moins initialement à juste titre, nos sociétés ont construit leurs politiques sociales en collectant des recettes fiscales ou plus simplement des impôts sur le travail et la rémunération des citoyens. Avec le temps, la compétition mondiale a créé des décalages importants entre les travailleurs de la planète, soumis à des régimes sociaux différents. Les travailleurs occidentaux ont vu leur compétitivité baisser, compte tenu du poids des charges salariales et patronales qui pèsent sur le travail. En particulier les métiers de fabrication de biens tels que l’assemblage de pièces et systèmes ou la confection des habits, dans lesquels la masse salariale joue un rôle central, ont été délocalisés comme nous le savons tous. Les machines ont, elles aussi, considérablement accru la productivité de différents secteurs de production. Se faisant, en France, le coût du travail des moins qualités est devenu trop élevé, poussant les états à revoir leur politique de prélèvement sur les plus bas salaires.

En France, la chose est assez visible, en particulier au niveau du SMIC. Toujours est-il que les charges de l’employeur sur les salaires au SMIC sont passées de 45% en 1980 à environ 5% en 2019… Cela fut nécessaire pour éviter que le coût du travail de ces travailleurs ne devienne supérieur à la valeur ajoutée produite, d’un point de vue purement économique et dans un contexte de compétition débridée, mondialisée et généralisée. Plusieurs autres abattements de charges ont également vu le jour pour les bas salaires jusqu’à 1,5 fois le SMIC et au-delà. Des informations très bien illustrées sont disponibles dans les premières pages du rapport des chiffres clés de la sécurité sociale.

Depuis quelques années, le ton monte et beaucoup, à juste titre, voudraient élargir l’assiette des prélèvements sociaux à tout ce qui produit de la valeur ajoutée et des revenus. On peut citer parmi les plus évidents, les revenus de la finance, avec des taxes sur les flux financiers, et plus récemment, une taxe sur les robots qui produisent des biens et des services. Mais la route est longue et semée d’embuches car tout élargissement de l’assiette des prélèvements est soit impopulaire, soit contre-productive aux yeux des décideurs. Selon eux, tout nouvel impôt conduirait à réduire, encore et encore, la compétitivité des entreprises ou à faire fuir les capitaux. Les chantages à l’emploi ou encore à l’investissement, les lobbys divers et variés, ont, jusqu’à présent, eu raison de toutes ces propositions.

Pourtant, il n’est pas bien difficile de comprendre que le modèle en place, qui taxe principalement le travail est à bout de souffle, injuste et pas assez universel. En mettant la pression sur une partie croissante des travailleurs, la compétitivité des travailleurs français baisse malgré les quêtes absolues de productivité dans le travail. Il n’est pas difficile de voir dans ce processus un chantage généralisé sur les citoyens pour pousser chacun d’entre nous à plus de travail, plus d’effort et de production, plus de profits. La menace du chômage, du déclassement mais aussi les perspectives de consommation ont raison de la plupart d’entre nous. Pourtant, d’autres organisations sont possibles.


Article suivant : Des politiques environnementales qui font des ronds dans l’eau

Article précédent : Energie-Machines/Etres humains, un rapport de force inégal

Début de l’analyse : La place de l’énergie dans nos sociétés

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *